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Syrie : un enjeu stratégique entre transition politique et rivalités internationales

  • marchesglobauxhec
  • Apr 1
  • 4 min read


Carla Moussu et l’équipe politique


Deux mois après la chute de Bachar el-Assad, la Syrie traverse une période charnière. La transition vers un régime plus démocratique est en marche, mais le pays reste marqué par des tensions internes et des enjeux géopolitiques majeurs. Si l’ouverture progressive de la Syrie vers la communauté internationale témoigne d’une volonté de stabilisation, l’instabilité politique et les violences intercommunautaires compromettent encore son avenir.

L’Union européenne débloque des fonds pour reconstruire le pays

Face au chaos qui a suivi la chute du régime, la communauté internationale tente de structurer l’aide à la transition. L’Union européenne a récemment annoncé une aide financière de 2,5 milliards d’euros sur deux ans pour soutenir la reconstruction et accompagner les réformes démocratiques en Syrie. Cette aide vise à :

  • Stabiliser l’économie en ruine et reconstruire les infrastructures de base.

  • Mettre en place un gouvernement de transition inclusif.

  • Soutenir les réformes judiciaires et institutionnelles en faveur d’un État de droit.

Cette ouverture européenne contraste avec la décision des États-Unis de suspendre leur aide à la Syrie. Washington, qui reste méfiant vis-à-vis du groupe Hayat Tahrir al-Cham (HTS), au pouvoir à Damas, conditionne toute reprise du soutien à des preuves tangibles d’un engagement en faveur des droits de l’homme et d’une rupture avec ses anciennes affiliations djihadistes.

Dans le même temps, la Russie, autrefois pilier du régime Assad, adapte sa position. Moscou a officiellement reconnu le gouvernement intérimaire et propose une « coopération pratique » pour assurer l’intégrité territoriale du pays. Elle a réduit sa présence militaire dans certaines zones, tout en maintenant ses bases stratégiques sur la côte méditerranéenne (un rappel de son intérêt à préserver son influence dans la région). On peut aussi y voir un calcul : mieux vaut s’entendre avec le nouveau régime syrien pour protéger ses intérêts à long terme.

Les alaouites : une minorité ciblée, reflet d’une instabilité persistante

Les alaouites, branche du chiisme (l’un des trois principaux courants de l’islam avec le sunnisme et le kharidjisme), ont longtemps été une communauté marginalisée, repliée dans les montagnes côtières de Syrie. Leur ascension au pouvoir s’est déroulée avec Hafez el-Assad, puis son fils Bachar el-Assad, tous deux alaouites, faisant de cette minorité un pilier de l’ancien régime.

Aujourd’hui, la chute d’Assad a exacerbé les tensions confessionnelles. Le nouveau gouvernement transitoire, dominé par les sunnites, majoritaires en Syrie, voit en eux les héritiers du régime déchu. Dans les bastions alaouites de Lattaquié et Tartous, des milices sunnites alliées au gouvernement perpètrent des massacres et expulsions, justifiés comme des représailles aux exactions passées. Mais pour certains groupes radicaux, il s’agit aussi d’éliminer toute influence alaouite dans la Syrie post-Assad.

Les chrétiens, également perçus comme liés à l’ancien régime, subissent des persécutions similaires, avec des églises incendiées et des villages attaqués.

Si le président intérimaire Ahmed al-Sharaa appelle à l’unité, son incapacité à protéger les minorités met en péril la transition démocratique et alimente l’instabilité du pays.

La Syrie, un échiquier stratégique toujours sous tension

Au-delà des dynamiques internes, la transition syrienne est influencée par des jeux de pouvoir régionaux et internationaux.

  • Le Liban : Fortement lié à la Syrie, il subit directement les conséquences de l’instabilité. Le Hezbollah, allié d’Assad, se retrouve dans une position délicate, accusé par le nouveau pouvoir syrien d’ingérences et de représailles contre des soldats du régime transitoire.

  • La Turquie : Ankara surveille de près la situation syrienne, notamment en raison de la présence des forces kurdes au nord du pays. Elle cherche à affaiblir toute entité kurde autonome et à maintenir son influence.

  • Israël : L’État hébreu a intensifié ses frappes contre les infrastructures iraniennes en Syrie, redoutant une montée en puissance des milices pro-iraniennes dans la région. Le plateau du Golan, une zone montagneuse stratégique, offre un accès rapide vers le territoire israélien et un point d’observation direct sur la Syrie. Pour Israël, contrôler cette région est une nécessité sécuritaire pour anticiper et neutraliser toute menace en provenance de la Syrie.

  • L’Iran : Ancien allié du régime Assad, l’Iran voit son influence en Syrie contestée. Ses bases militaires et ses milices sont régulièrement ciblées par Israël et la Turquie, l’obligeant à repenser sa stratégie.

  • Les Kurdes : Longtemps soutenus par les États-Unis dans la lutte contre l'État islamique, les Kurdes syriens craignent aujourd'hui un abandon, notamment après le retrait partiel des troupes américaines. Leur avenir dépend des négociations avec le gouvernement transitoire, qui veut reprendre le contrôle de leurs territoires. Mais Ankara (capitale turque, symbole de son gouvernement), voyant en eux une menace, fait pression pour limiter leur autonomie, les assimilant au PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan, un groupe séparatiste kurde en conflit avec la Turquie). Isolés, les Kurdes risquent de perdre leurs acquis.



Un avenir incertain mais une fenêtre démocratique à saisir

La Syrie est aujourd’hui à la croisée des chemins. Le gouvernement intérimaire affiche une volonté de démocratisation et bénéficie du soutien européen, mais l’instabilité persiste. Les divisions internes et la violence intercommunautaire fragilisent toute tentative de stabilisation, tandis que les minorités, en particulier les alaouites et les chrétiens, restent vulnérables.

Sur le plan international, les rivalités géopolitiques compliquent la transition, exposant la Syrie aux ingérences extérieures. La communauté internationale devra agir pour éviter que cette transition ne soit qu’un simple changement de pouvoir. L’Histoire montre que les démocratisations post-dictatoriales sont incertaines : la Syrie peut soit amorcer un renouveau, soit basculer à nouveau dans le chaos.


Carla Moussu et l’équipe politique


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